Les étapes pour mettre en place une société sans argent

Il sera nécessaire d’avoir une approche systémique. La systémique étudie les systèmes complexes en se concentrant sur les interactions entre leurs éléments pour mieux comprendre leur fonctionnement. C’est une approche globale, interdisciplinaire, utilisée pour résoudre des problèmes complexes. Cependant, il ne faut pas associer le mot complexe (comportant de multiples éléments) à celui de compliqué (difficile à comprendre).

Voici une liste non exhaustive des étapes à réaliser avant de basculer dans une société sans argent.

Les métiers et les emplois

L’évolution des métiers

Selon les fichiers ROM du Pôle-emploi, il y a 532 métiers et 11 000 déclinaisons. Des centaines de métiers vont disparaitre, les autres vont devoir plus ou moins évoluer. Il est nécessaire que chaque secteur de métier se réunisse pour mettre en place les futurs changements les concernant.
Par exemple, de quelle façon vont se réorganiser les agences immobilières ? Choisiront-elles d’attribuer gratuitement un bien au plus utile (par exemple : un logement de plain-pied pour des personnes âgées), au plus écologique (pour éviter les trafics pendulaires), par tirage au sort ou autre ? Y aura-t-il des règles similaires au niveau national ou des décisions locales ?

Le flux des emplois

Suivant les métiers qui disparaissent, il est nécessaire de savoir combien de personnes vont se retrouver sans emploi. D’ores et déjà, 2 millions d’emplois dans les secteurs financiers, bancaires et économiques disparaissent dans une France postmonétaire. À cela, il faut rajouter d’autres métiers tel que les publicitaires, les commerciaux, les investisseurs… et les demandeurs d’empois actuels.

Ensuite, il faut anticiper le flux des travailleurs pour réorganiser les postes. Entre ceux qui veulent en profiter pour changer de métier, et ceux qui n’ont pas l’intention de travailler, des postes vont rester à pourvoir. Ceci doit être anticipé car le savoir-faire doit absolument perdurer dans l’entreprise.

Plus on se rapprochera de la date fatidique d’une société postmonétaire, plus les formations devront s’accroitre afin que tous les actifs puissent travailler dans leurs entreprises respectives le jour J.

À cela se rajoutent les taches ingrates ou difficiles qu’il faudra partager.

Donc dans un premier temps, un sondage national doit être réalisé pour comprendre les aspirations de chacun.

Une logistique qui n’a rien d’insurmontable. D’autant plus que le flux des emplois n’a pas besoin d’être géré par l’état. Chaque entreprise sera à même de réaliser un sondage auprès de ses employés et anticiper le besoin de main d’œuvre.

Extrait : Argent trop cher, immersion dans un monde sans argent

Tandis que les plus riches convertissent leurs euros en dollars et s’exilent, je m’attèle à un questionnaire en ligne obligatoire ; il est accessible depuis un an mais je n’ai pas encore pris le temps de me pencher dessus. Je m’enferme dans mon bureau pour être au calme et je clique sur le lien…
« Souhaitez-vous travailler un minimum de vingt-quatre heures par semaine pour être éligible à 100 % ? »
Après en avoir relu les avantages, je clique sur « Oui ».
« Quel est votre choix d’activité ? (plusieurs réponses possibles) »
 Par curiosité j'inscris mon métier, « consultant en webmarketing ». Un message s’affiche soudain : « Ce métier ne devrait plus exister dans un monde sans argent. Nous vous conseillons d’opter pour une autre activité. Si vous conservez tout de même ce métier, prévoyez qu’il sera à réinventer pour être en accord avec la nouvelle société. » Comme je devrai les premières semaines faire quelques ajustements sur les sites que je gère, je valide le maintien de mon métier.
« Demi-journée partagée : Votre activité implique obligatoirement un partage des tâches dans les secteurs qui manquent de personnel. Choisissez vos secteurs à exercer quatre heures par semaine en moyenne, trajet inclus. » J’inscris sans conviction « Agriculture ».
Les autres questions sont relatives à mes compétences, ambitions, besoins de formation… Pour terminer, je signe numériquement le « contrat de réciprocité » qui m’engage à mettre mes services à disposition des autres pour pouvoir profiter des leurs.

Les différents modèles de société

Quatre modèles de société sans argent peuvent être mis en place. Elles seront organisées en fonction des réponses données à ces deux questions fondamentales :

Faut-il différencier les droits d’accès des biens et des services entre les actifs et les inactifs ?
Ceux qui travaillent X h/semaine auront plus de droits que ceux qui ne travaillent pas. Le choix d’un quota d’heures de travail permet surtout d’inciter la population à travailler. Mais il impose un système de carte ou d’appli pour bénéficier des biens et des services destinés uniquement aux actifs. Exemple : Pour aller au restaurant on vous demandera votre «pass d’actif» pour vérifier votre éligibilité.

Faut-il un accès aux biens et aux services restreint par un quota individuel ?
Exemple : Chacun a un quota de textiles, de nourritures, de services… Ou un quota suivant l’empreinte carbone du bien acquis. Un quota individuel est un modèle qui impose de garder une valeur à chaque bien et un système de calcul pour chaque bien et service acquis. Il permet un contrôle et une équité, mais oblige toujours cette action « d’achat » pour acquérir quelque chose, ainsi que le maintien de caissiers.ères. À l’inverse, avec l’absence de quota, la quantité de biens et de services est gérée par ceux qui les produisent.

Pour y répondre, de nombreux débats devront être menés. D’ores et déjà, on peut prévoir que les citoyens souhaiteront en majorité dans un premier temps une société qui encourage le travail et qui s’assure que des quotas seront mis en place pour éviter les abus. Mais des sondages qui annoncent un très faible pourcentage de futurs inactifs pourraient rassurer au fil du temps. Tout comme des études comportementales qui prouvent que l’on ne surconsomme pas lorsque tout est gratuit, notamment grâce à la mise en commun de nombreux objets.

Il faudra donc du temps pour faire évoluer les idées, mais un jour, un référendum sur ce sujet devra avoir lieu pour préparer la nouvelle société que l’on aura choisie. Cette dernière pourra d’ailleurs évoluer au fil du temps pour tendre vers une société libre sans quota.

En savoir plus sur les 4 modèles.

Comportements

Nous ne connaissons pas encore comment les citoyens se comporteront lorsqu’ils entreront pour la première fois dans une société sans monnaie. Afin de l’anticiper, des études devront être menées sur des groupes d’individus.

Par exemple, une centaine de personnes pourraient se voir octroyer une carte de paiement illimité pour leur propre consommation alimentaire sur six mois ou un an. On pourrait ensuite étudier leur comportement : achètent-ils uniquement de la nourriture biologique ? Prennent-ils des aliments trop gras, trop salés ou au contraire prennent-ils des aliments plus sains ? Le chariot est-il plus rempli qu’avant ? Vont-ils au restaurant quotidiennement ? Ont-ils pris du poids ? Cela influe-t-il sur leur santé ?

De même, d’autres études comportementales sont à prévoir sur les vêtements et objets du quotidien.

Neurosciences 

Poursuivre des études sur les interactions entre le cerveau et l’argent permettrait de valider scientifiquement l’importance d’une société a-monétaire. Voici quelques études déjà réalisées :

Science & Vie Hors Série N°299 : Pourquoi l’argent nous obsède – Les réponses des neurosciences

Cerveau et psycho N°63 : Comment l’argent modifie nos comportements

Paul Piff : L’argent nous rend-il mauvais ?  https://www.youtube.com/watch?v=bJ8Kq1wucsk&t=0s

Expérience sur l’influence inconsciente : https://www.youtube.com/watch?v=k3Y2-PyvpoM&t=0s 

Sondages nationaux :

Pour mettre en place cette nouvelle logistique, de nombreux sondages nationaux devront avoir lieu. Voici quelques questions auxquelles il faudra s’attendre :

Quels métiers souhaitez-vous exercer dans un monde postmonétaire ?

Acceptez-vous de faire une demi-journée par semaine un métier qui manque de main d’œuvre ? (car ingrat, pénible… même si le nombre de personnels et les moyens seront mis en place pour rendre cette tâche moins pénible).

Comment appréhendez-vous ce changement de société ?

Etc.

Les pénuries

Dans un système capitaliste, une pénurie engendre une montée des prix. Ainsi, seuls les plus riches ou ceux prêts à en mettre le prix en profitent. Généralement, les plus pauvres sont forcés de s’en passer. Dans une société a-monétaire, il faut prévoir comment agir face à une pénurie.

Texte de loi

Le Code civil contient 3540 pages à réécrire. Dont sûrement 90 % à jeter à la poubelle.

Extrait : Argent trop cher, immersion dans un monde sans argent

— Les trois mille pages du Code civil et du Code pénal ont pris cher ! m’explique mon partenaire accroupi tout en m’aidant à la pose des jambes de force aux angles de la serre. Une fois les références à l’argent retirées, il n'en reste pas grand-chose. La taille d’un roman court, tout au plus. Je ne sais même pas si mon métier de juriste d'entreprise existe encore. En tout cas, les études pour être avocat sont bien moins longues. Encore un temps précieux de gagné ! En plus, tout un tas de spécialisations ont sauté : droit fiscal, droit bancaire, droit des affaires, droit des assurances...
— Et comment as-tu vécu ce changement de vie ?
— Comme une renaissance ! Protéger coûte que coûte les intérêts des entreprises m’a filé le bourdon. Maintenant, ma vocation c’est l’apiculture !

Autonomie :

Dans une société sans argent, l’autonomie est le maitre mot. L’humanité tout entière est autonome, elle se suffit à elle seule. Mais qu’en est-il si un seul pays ou un seul continent souhaite basculer dans une société postmonétaire ? Il lui faudra être autonome autant que possible.

Par exemple la France peut-elle être autonome ? En combien de temps ? Est-ce que ce sera suffisant de relocaliser des entreprises et créer de nouvelles filières ou faudra-t-il un territoire plus grand tel que l’Europe ? Arrivera-t-on à équilibrer parfaitement les importations et les exportations ?

Prenons l’exemple des vêtements. En 2020, la France a importé près de 10 milliards de vêtements, ce qui la place au troisième rang des importateurs européens de vêtements en provenance de pays tiers. D’un autre côté, la France se distingue en tant que leader de la production de lin, avec une part de 75 % de la production mondiale effectuée sur son territoire. Le lin est une plante cultivée pour ses fibres qui sont utilisées dans la fabrication de textiles, mais aujourd’hui plus de 90% de cette production végétale est exportée vers l’Asie. La France a donc déjà la matière première, il lui suffit de créer des usines pour fabriquer les vêtements sur place. Autant de gaz à effet de serre qui ne sera plus émis dans le transport du lin vers l’autre bout de la planète ! Et tout autant pour les vêtements qu’il ne sera plus nécessaire d’importer.

Autre exemple de l’aberration du système marchand (il y en a tant !), cette fois-ci avec la filière du bois. La France est le deuxième producteur de chêne au niveau mondial. Cependant elle exporte du bois brut, notamment vers la Chine et importe du bois transformé qui n’a pas été valorisé. Encore des allers et retours inutiles que seule la “logique” propre au capitalisme peut expliquer.

L’autonomie a donc un intérêt autant écologique que… logique !

Importation :

Quel que soit son degré d’autonomie, la société devra importer ce qu’elle ne peut produire. Par exemple des matériaux rares, du pétrole, de l’uranium, du silicium… ainsi que du café et produits de consommation. Pour ce faire, il faudra trouver un équilibre parfait entre les importations et les exportations.

À ce jour, la France importe plus qu’elle n’exporte :

Une politique de relocalisation et l’ouverture de nouvelle filaire devraient résoudre le problème. Ceci dit, ce qu’on produit dans une société sans argent est réalisé bénévolement. Donc attention au dumping social ! Ce problème complexe est mis en lumière dans le roman Argent trop cher.

Anticiper les problèmes éventuels

Toute l’efficacité d’une société sans argent dépendra en grande partie des problèmes que l’on aura anticipés. En voici quelques exemples :

  • Un réseau parallèle de cryptomonnaie (la cryptomonnaie devra être interdite dans la société postmonétaire. De plus pour éviter de nouveaux réseaux, le cannabis devra surement être légalisé).
  • Une pénurie de main d’œuvre pour l’abattage des animaux (faudra-t-il se tourner vers la viande en culture ?).
  • Une explosion démographique (mais l’accès à l’éducation permettra-t-il de diminuer le nombre d’enfants par couple ?).
  • Une aggravation de l’obésité (cependant, des études montrent clairement une corrélation entre inégalités sociales et obésité)
  • Une augmentation des agressions sexuelles suite à la disparition des prostituées (mais la police, libérée des vols, arnaques, fraudes fiscales, pourra mieux répondre à cette problématique).
  • etc.

Les difficultés proviendront donc surtout de ce que l’on n’avait pas anticipé, de l’inattendu.

Et par-dessus tout, il faut du temps.

Du temps aux Français pour comprendre, découvrir ce qui va changer dans leur vie, se former à leur métier postmonétaire…

Mais tout ceci peut parfaitement être réalisé en moins de 10 ans !

Plongez dans l’expérience d’une société postmonétaire

avec le roman anticipatif : Argent trop cher, immersion dans un monde sans argent

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6 réflexions sur “Les étapes pour mettre en place une société sans argent”

  1. Très belle approche ! Elle nous apporte la vision d’un soulagement et d’un réconfort. L’espérance aussi de pouvoir la vivre puisque chaque difficulté est annoncée de sorte que nous puissions l’anticiper et la démanteler. Merci !!!

  2. Je pense que dans cette nouvelle (société)ce nouveau monde
    c’est avoir à l’esprit que c’est le NOUS qui passe
    avant Le MOI JE ,
    car ceux qui possèdent du bien aurons du mal a le mettre au service de la collectivité c’est a dire du NOUS …je pense que déjà il faut être au clair avec Ça !
    C’est peut être plus facile pour ceux qui se sont déjà pas mal dépouillés de la matière .

    1. Dans un monde sans argent, la compétition est remplacée par la coopération. L’individualisme est remplacé par le partage et la mise en commun. Mais effet, c’est aussi un changement mental profond qu’il va falloir opérer.

      1. Dans un monde sans argent, qui decide que c’est mieux pour l’individu de faire comme ci ou comme ca? On a vu ce que donne l’impositioon à tous d’une seule maniere de penser pour le soi-disant bien commun. D’un point de vu materiel, qui a l’acces a la maison pres de la plage et l’appartment au 12ieme étage d’un HLM? Qui decide que on est trop sur terre car ca gène l’idee motrice d’un vivre ensemble en commun si on est trop nombreux? Bref, le vivre sans argent doit etre remplacé par un autre echange de confiance et tangible et je ne sais pas si ce mouvement là a cette vocation …. transparence et honnetete sont aussi des valeurs essentielles.

        1. Sébastien Augé

          Une démocratie citoyenne et des choix locaux avec les intéressés doivent accompagner cette nouvelle société. Je t’invite à découvrir mon roman “Argent Trop Cher” qui répond à toutes ces questions. J’ai hâte de connaitre ton avis une fois que tu l’auras lu.

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